Martin est confiné. Coincé dans son appartement en ville, ses jours se ressemblent et il cherche la solution. Il guette les infos, il cherche un peu à oublier, il tourne en rond. Il a de quoi se nourrir et s’occuper, il lit, écrit parfois, il s’évade un peu grâce aux écrans. Il tente de tuer tuer le temps, en espérant que ce dernier ne lui résistera pas trop.
Madeleine est confinée. Coincée sur son banc public où elle dort depuis déjà trop longtemps, elle regarde le ciel ou cherche à s’éloigner du sol, de tout ce qui l’a déposée là. Elle attend sagement la nuit, elle redoute un peu l’aurore. Elle, Mada, c’est le temps qui la tue à petit feu, et c’est elle qui espère lui résister encore un peu, malgré tout.
Emma est confinée. Coincée à la campagne avec ses quatre enfants, elle essaie d’occuper tout le monde et prend moins de temps pour s’occuper d’elle. Elle fait les devoirs des petits et remplit les siens. Elle mesure sa chance, mais elle est inquiète aussi. Elle pense à leur avenir, ça la réveille la nuit. Le temps, Emma, elle le regarde par la fenêtre. Elle espère que le printemps tuera vite l’hiver, elle puise dans son invincible été.
Marius est confiné. Il a pourtant le droit de sortir, lui, pour ramasser les poubelles des autres. Il aime se rendre utile et, tôt le matin ou tard le soir, il fait ce qu’il a à faire. Tous ces sacs lui font un peu peur, mais il essaie de ne pas y penser. Confiné dans son courage et la solitude des héros officieux, il tient le coup. Le temps, lui, il ne l’a pas. Quelques heures seulement pour être chez lui à vider son propre sac.
Simone est confinée. Elle n’a plus trop la force de jouer au Scrabble depuis que ses enfants ne peuvent plus venir la voir. Elle souffre un peu du dos et surtout de l’absence des siens. Elle survit grâce aux copines de l’Ehpad mais les journées sont un peu longues. Le temps, elle le rembobine alors. Elle repense à l’époque où elle n’était jamais seule, ce « bon vieux temps » où il restait plus de sable en haut du sablier.
Lionel est confiné. Après ses heures de service à l’hôpital, il rentre épuisé dans sa maison désertée par ses proches. Partis se mettre à l’abri, ils lui passent des appels et lui envoient des messages. Mais son temps, lui, il le donne aux autres, à ceux qu’il ne connaît même pas. Il sait qu’il ne le rattrapera pas, mais il a appris à ne pas compter. Pas comme ça.
On est confiné. On a peur, on s’ennuie, on est chanceux ou un peu moins, on est tous enfermés quelque part, un peu seuls.
Mais après avoir tant parlé de la pluie, nous pourrons un jour parler du beau temps, j’en suis sûre. Et vous verrez, l’été prendra toute la place.