Cher Jean,
Il y a des lundis qui piquent (encore) plus que d’autres. Aujourd’hui, par exemple. On a tous la moustache qui picote. On a l’impression qu’il nous manque un truc entre le nez et les lèvres depuis qu’on a reçu une notification sur notre smartphone : « Jean Rochefort est mort à 87 ans ».
Moi j’avais l’impression que t’étais immortel. Qu’on ne pourrait jamais lire une date de fin sur ta page Wikipédia. Que ta moustache ne blanchissait que pour te rendre encore plus chic, et que ta voix s’épaississait pour accroître encore ton génie drôle, et ta présence… Ta présence. Tu vois, tu l’as bien fait ton cinéma. Tu tires ta révérence et tu rejoins Noiret, ce vieux fusil qui a passé l’arme à gauche bien longtemps avant toi. Nous, on reste là, à se demander quel morceau de ta filmographie immense on va bien pouvoir se regarder ce soir pour oublier un peu les infos du jour.
Aujourd’hui, tu nous fais pleurer. Mais avant cela, tu nous auras bien fait rire. Mariole avec Marielle, ravi avec Edouard Baer, brillant poète en lecteur moderne du Petit Prince… Sans cesse décalé et toujours à la mode, tu devais cacher bien des secrets derrière ton épaisse moustache pour avancer avec tant d’élégance.
Je pense à toi en Loïs de Monmajour déjanté dans Le château de ma mère. Comme dans le film, j’aimerais que la pendule du salon ne soit pas à l’heure pour que tu puisses jouer la comédie encore un peu, et que je ris avec toi, en demoiselle de Rochefort que je suis…
Mais le rideau est tombé et tu galopes déjà vers ailleurs. Je te souhaite alors un beau voyage loin des projecteurs qui t’auront tant aimé.
😍
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