
Les cartes postales.
Tu as le projet d’en envoyer une dès le premier jour de ton séjour.
Quand tu décides enfin d’aller au tabac-presse du coin, tu mets du temps à choisir le bon visuel. Tu fais tourner le tourniquet encore et encore. Il y a une vieille qui le fait tourner dans l’autre sens. C’est la guerre des anciens qui résistent encore aux échanges numériques.
Tu finis toujours par acheter une photo classique de paysage avec une police kitsch et colorée. Tu pourrais acheter le timbre en même temps, mais ça fait trop de vieilleries d’un coup. Tu feras ça en deux étapes. Ou tu garderas la carte dans un tiroir, faute d’être passé à l’étape 2.
Tu repars quand même de la boutique avec d’autres indispensables de vacances comme un carnet de mots fléchés et un pistolet à eau made in China.
Au moment de rédiger, tu trouves rien de très original à dire… « Un petit coucou du paradis où on recharge les batteries. Soleil, visites, plages… Vive les vacances ! J’espère que toi aussi tu profites bien. Gros bisous. » Finis les « bien cordialement » et les signatures électroniques, tu dessines un smiley et un cœur tout en bas, si par chance il reste encore un peu de place.
En fait il n’y a jamais assez de place.
Tu envoies un WhatsApp pour avoir l’adresse du destinataire que tu as encore oubliée. Décidément rien ne résiste au smartphone.
Le temps qu’il te réponde, tu es déjà sur la route du retour. Tu posteras donc la carte de chez toi. Dans quelques jours. Ou pas.
Mais c’est pas grave, c’est l’intention qui compte.
Quand t’arrives chez toi, t’as le bonheur d’en découvrir une dans la boîte aux lettres. Certains anciens sont plus rapides et plus efficaces que d’autres.
Ça fait un petit bond dans ton coeur de ieuv. Tu l’affiches fièrement sur le frigo quelques jours, puis tu la ranges dans un tiroir. A côté de celle que tu t’as pas envoyée.
Un lundi de rentrée, tu tomberas peut-être dessus par hasard en cherchant ton chéquier ou ton bulletin d’inscription à la cantine, qui, eux, n’auront jamais le temps de jaunir.
T’apprécieras finalement ce qui reste et jaunit à la fois.
T’esquisseras alors un beau sourire de carte postale.