Quand j’ai écrit mon roman « Le soleil vous appartient », je l’ai d’abord fait un peu égoïstement pour moi. Ça faisait un moment que je rêvais d’écrire mon livre, et tout à coup, c’est sorti comme un éclair. Au fil de l’écriture, je me suis rendue compte que je le faisais un peu pour ma famille aussi, pour mon petit frère en particulier bien sûr, et pour tous ces moments doux passés ensemble dans les années 1980-1990. Puis j’ai commencé à penser à tous ceux qui ont connu le protagoniste, et peu à peu on s’est retrouvé à plein dans ma tête, sous ma plume, c’était parfois « un sacré bordel » comme aurait dit si justement mon petit frère avec ses mots de djeuns.
Ensuite le livre est sorti, il a fait son chemin, il s’est échappé de moi comme un cri de fin de soirée, avec sincérité et lâcher-prise. Je n’y pense plus comme avant. Parfois je le regarde posé sur ma bibliothèque, au milieu des autres, comme on admire son enfant au milieu d’une cour de récré. Je suis assez fière de lui et je me rends bien compte qu’il ne m’appartient plus vraiment, et que c’est ça qui est beau. Je passe alors à la pensée d’après, à la ligne qui attend son tour, aux mots qui voudraient bien trouver leur place, eux aussi, au milieu des objets de déco de mon salon.
Puis cet après-midi, il s’est passé un truc étrange. J’ai découvert qu’une personne que je ne connais pas a créé une playlist intitulée « Dorothée Pierry – Le soleil vous appartient » sur Youtube, avec tous les morceaux que j’avais cités dans mon bouquin. Ça a tapé fort dans ma poitrine. J’ai bien cherché quelques instants à savoir qui se cachait derrière cet admirateur secret, mais j’ai vite renoncé…
Qui que tu sois, quoique tu fasses, comme disaient Les Inconnus, tu as fait le bonheur de ma journée. J’aurai désormais une personne de plus dans ma tête quand j’écrirai enfin mon prochain bouquin. Je t’emporterai avec moi dans ce « sacré bordel », avec cette petite flamme secrète de l’écrivain qui rêve que ses mots s’échappent au loin, sans permission ni retenue.