La mouche et le chou.

J’ai choisi ce titre, « La mouche et le chou », juste parce que je trouvais qu’il sonnait bien. Il m’est venu hier soir sur le chemin pour aller au théâtre avec des amis. On allait voir une pièce géniale qui s’appelle La Mouche, et ça sentait le chou sur le chemin. Un de nos potes avait cuisiné avant de partir le genre de truc qui poursuit ton odorat un bon moment. Je trouvais ça cool, comme association, la mouche et le chou. C’était un bon début de soirée. Et quand ça commence comme ça, on est rarement déçu.

On a ri. J’espérais secrètement voir apparaître un mouche géante sur scène, je chuchotais « fly me to the mouche » à mesure qu’on s’approchait de la Criée. On n’a pas vraiment eu la grosse bête poilue qu’on voit dans le film du même nom, mais on a eu beaucoup mieux. Une salle remplie de centaine de personnes rassemblées malgré le coronavirus, l’insolence de ceux qui continuent à se faire la bise, et l’odeur de chou qui persistait. On a eu le bonheur de retrouver des amis qu’on ne connait pas depuis si longtemps, mais avec qui ça a fait mouche tout de suite. On a eu le rire d’Olivia derrière nous et en écho, celui de Clémence, dans un enchantement commun. On a eu quatre acteurs incroyables qui m’ont fait oublier un peu que le 6 mars et ses notifications tristes sur mon téléphone approchaient tout doucement. On a eu un joli moment.

Finalement, la mouche et le chou, c’est une belle association. Du genre de celles que je cherche depuis neuf ans, pour trouver un sens aux choses qui pourraient sembler vides sans lui. Je me raccroche aux odeurs, aux éclats, aux mises en scène, et je finis toujours par en trouver, du sens. Je laisse une petite lumière allumée, au cas où, comme à l’époque où il avait peur du noir, mon petit chou, et ça me montre le chemin. Il y a malgré tout quelque chose qui ne se tait pas, un cri du 6 mars que je couche sur le papier, parce que chez moi, ça sort comme ça les hurlements.

J’écris parce que depuis tout ce temps, et même avant ça d’ailleurs, il y a quelque chose qui brûle au fond, parfois beau, parfois terrifiant, et qui trouve son berceau sur une feuille blanche. J’écris parce qu’il faudrait être fou pour croire que la douleur s’éteint dans le silence. J’écris parce qu’il y a quelque chose d’universel dans ces tremblements qui se transforment en mots… il y a nous sur des gros fauteuils rouges, à contempler la vie qui fait son spectacle, et qu’il faut bien trouver un rôle à jouer. Mon rôle à moi, je crois, c’est de me servir de ce qu’il nous a laissé, et d’en faire quelque chose de fécond, puisque à lui, on lui a retiré le crayon.

J’écris parce qu’entre la mouche et le chou, j’ai l’impression de pouvoir trouver de quoi nous sentir vivants encore un bon moment, même après le tomber de rideau.
Show must go on.

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